Style Henri II

Le style Henry II était le principal mouvement artistique du XVIe siècle en France, faisant partie du maniérisme nordique. Il est venu immédiatement après la haute Renaissance et était en grande partie le produit des influences italiennes. François Ier et sa belle-fille, Catherine de Médicis, avaient importé en France un certain nombre d’artistes italiens de l’école de Raphaël ou de Michel-Ange; les Français qui les ont suivis en travaillant dans l’idiome maniériste. Outre le travail des Italiens en France, de nombreux Français ont appris l’italianisme tout en étudiant l’art en Italie au milieu du siècle. Le style Henry II, bien que nommé d’après Henri II de France, a en effet duré de 1530 à 1590 environ sous cinq monarques français, leurs maîtresses et leurs reines.

Les produits les plus durables du style Henry II étaient architecturaux. D’abord Rosso Fiorentino, puis Francesco Primaticcio et Sebastiano Serlio servaient Henri II comme artisans de la cour, construisant sa galerie et l’Aile de la Belle Cheminée (1568). L’architecte français Pierre Lescot et le sculpteur Jean Goujon ont reconstruit le Palais du Louvre autour de la cour carrée désormais célèbre. Le château d’Anet, commandé par Diane de Poitiers, maîtresse d’Henri II, a été conçu par Philibert Delorme, qui a étudié à Rome. Le très maniériste château abritait une statue de Diana de Benvenuto Cellini, qui travaillait en France. En 1564 Delorme a commencé à travailler sur les Tuileries, le palais parisien le plus remarquable du style Henry II. Il présentait aussi un traitement maniériste des thèmes classiques, pour lequel Delorm avait développé son propre «ordre français» des colonnes.

Jean Bullant, un autre architecte qui a étudié à Rome, a également produit des dessins qui combinaient des «thèmes» classiques dans une structure maniériste. Le château d’Écouen et le château de Chantilly, tous deux pour Anne de Montmorency, illustrent le château de style Henri II, qui proliférait parmi la noblesse. Un catalogue très complet des gravures de l’architecture française du XVIe siècle a été réalisé par Jacques Androuet du Cerceau l’Ancien sous le titre Les plus excellents basements de France (entre 1576 et 1579, en deux volumes). Une grande partie des bâtiments ainsi gravés ont été détruits (comme les Tuileries) ou significativement modifiés (comme Écouen), de sorte que les reproductions de Cerceau sont le meilleur guide du style Henri II.

Origines
Inspiré par les formes de mobilier et de décoration de la seconde moitié du XVIe siècle, le style Henry II ou style néo-Renaissance s’est développé en France à partir du règne de Louis-Philippe. La Renaissance française, honorée d’abord par le musée des monuments français d’Alexandre Lenoir mais surtout par l’architecte Félix Duban, trouve sa popularité au XIXe siècle par son origine nationale, et l’alternative qu’elle propose au sacro-saint style néoclassique imposé comme norme académique depuis l’Ancien Régime. La diffusion des formes et leur succès sont également encouragés par les courants romantiques et les succès littéraires populaires d’Alexandre Dumas Sr. et de Victor Hugo. Il a atteint son apogée sous le Second Empire, avant d’être décliné dans la fabrication de mobilier industriel. Devenu un style convenu au début du XXe siècle, il est progressivement devenu obsolète après la Première Guerre mondiale.

Caractéristiques
Le mobilier et le décor reflètent les formes stéréotypées de la seconde Renaissance française: décor architectural, masques, plateaux soutenus par des colonnes annelées, grotesque, feuilles d’acanthe, grandes corniches débordantes, balustres tournés et sculptures figurées en bas-relief. Les frontons sont presque toujours ornés d’un cartouche. Le goût est dans la « haute époque », y compris le Moyen Age, la Renaissance et la première moitié du 17ème siècle. Henri II du XIXe siècle est aussi un style assez composite, selon la tendance éclectique de l’époque, et mêle souvent la Renaissance aux formes appartenant au style Louis XIII (ou plus rarement Louis XIV) telles que les colonnes torses, les diamants … motifs inclinés et franges sur les meubles rembourrés. Le régionalisme est également présent à la fin du siècle, avec l’intégration de styles régionaux tels que ceux du mobilier basque ou breton.

Popularité
Dans les châteaux et les appartements aisés, les amateurs utilisent ce style évocateur, parfois pour mettre en valeur le véritable mobilier Renaissance dont la collection est très à la mode. Souvent, d’ailleurs, ces meubles d’époque sont très retouchés ou reconstruits par des ébénistes à partir d’éléments d’origines disparates. C’est aussi un style fréquent dans l’agencement des appartements des bâtiments d’Etat, puis des monuments historiques: Palais des Tuileries, Louvre, divers ministères, bibliothèques … Un bon exemple est la Chambre du Comte de Chambord au Château de Chambord:

La réalisation de colonnes et de pieds en bois de plus en plus industrialisés permet de réaliser des meubles de style à des prix bas et des performances attractives. Le mobilier est donc orné d’une grande quantité d’ornements et souvent esthétiquement très lourd. La qualité des sculptures est parfois très petite. Les bois privilégiés sont sombres et massifs, avec une prédilection pour le chêne et le noyer, quand ils ne sont pas carrément noircis selon la mode Napoléon III.

Vendu par les manufacturiers en catalogue, sous le nom de Henri II, ce style est appliqué à des formes de mobilier sans rapport avec la Renaissance, mais adaptées aux usages modernes de la fin du XIXe siècle: tables de billard, porte-manteaux, miroirs, glacières …

Des ensembles coordonnés sont généralement disponibles pour les chambres (lits, tables de chevet et armoires) et les salles à manger. C’est aussi un style particulièrement populaire pour ces pièces, les sets comprenant la table à rallonges, quatre ou six chaises (généralement tapissées de cuir gaufré ou de cannage), un buffet à deux corps vitrés (parfois avec des vitraux colorés ou plus rarement une commode) et un service.

Avec un rythme un peu prétentieux, associant avec plus ou moins de talent les registres nobles, la grande histoire et la fabrication de masse bon marché, et produit en très grande quantité, il est parfois assimilé à une forme de kitsch. Le terme Henry II a ainsi pris une connotation souvent péjorative. Associé à la petite bourgeoisie par des artistes et des écrivains, tels que Guy de Maupassant ou Philippe Jullian, ce style devient l’objet de blagues et de blagues:

«Quant aux millionnaires qui achètent aujourd’hui toutes les horreurs des siècles passés, ils font partie de cette race que Gantier appelait bourgeois: je parie qu’il y a, à Paris seulement, dix fois plus de lits seigneuriaux du style Henri II que Il n’y avait pas dans toute la France sous ce prince, et n’oublions pas, d’ailleurs, que la moitié de cette litière barbare a été détruite à mesure que l’art du sommier a mûri.

De même, mal adapté aux intérieurs modernes, et en contradiction avec le goût du vingtième siècle pour la sobriété et le fonctionnalisme dans le design, il est devenu relativement peu valorisé en France.

Ceci s’applique uniquement à la version industrielle de Henri II. Malgré cela, les musées et les châteaux conservent également des exemples de très haute qualité, réalisés par des ébénistes de renom. Un bon exemple est la salle à manger qu’Eugène Grasset fit en 1880 pour l’éditeur et collectionneur Charles Gillot (Musée des Arts Décoratifs, Paris). Dans ce cas, les formes d’Henry II sont proches des lignes de l’Art Nouveau et donnent un caractère presque symboliste aux intérieurs.

La peinture
En peinture, comme en architecture, les Français étaient influencés par le maniérisme italien et de nombreux peintres et sculpteurs italiens étaient des membres actifs de la Première Ecole de Fontainebleau, qui produisait à son tour une collection active et talentueuse de peintres et sculpteurs autochtones, tels que Germain Pilon et Juste de Juste. À la fin du siècle, le style Henry II, une forme de maniérisme italien gaulois, a été remplacé par un classicisme plus cohérent, avec des allusions au baroque à venir. Son successeur immédiat dans l’historiographie de l’art français est le style Henry IV.

Pablo Picasso a produit une série de peintures sur le thème d’un buffet Henri II avec un chien. Les ornements lourds deviennent des formes brisées et sombres qui dominent les objets et les personnes qui les entourent (Buffet Dog Henri II, h / t, 162 × 130 cm, 1959, collection privée).
Paul Signac et Édouard Vuillard représentent souvent des figures de personnages dans les intérieurs de ce type

Littérature
Marcel Proust, dans In Search of Lost Time, fait du style Henry II le style de la maison de rêve d’Odette, certainement pour évoquer ses goûts artistiques vulgaires et m’avez-vous vu:
« … une fois elle a parlé à Swann d’un ami qui l’avait invitée et avec qui tout était« de l’époque », mais Swann ne pouvait pas lui faire dire ce que c’était, mais elle a répondu après avoir réfléchi « moyenâgeuse » Elle voulait dire qu’il y avait des boiseries, elle lui répéta, un peu plus tard, de son amie, et ajouta, du ton hésitant et de l’air dont nous citons une personne avec qui nous avions diné la veille et dont nous n’avions jamais entendu, mais que vos hôtes semblaient penser à quelqu’un de si célèbre que nous espérons que l’interlocuteur saura de qui vous voulez parler: « Elle a une salle à manger … à partir du … dix-huitième! Elle l’a trouvé effrayant, nu, comme si la maison n’était pas finie, les femmes avaient l’air affreuses et la mode ne le prendrait jamais. Enfin, une troisième fois, elle parla à nouveau et montra à Swann l’adresse de l’homme qui avait fait cette salle à manger et qu’elle voulait venir, quand elle aurait de l’argent, pour voir si elle ne pouvait pas le faire, certainement pas une telle chose, mais celle dont elle rêvait et que, malheureusement, les dimensions de son petit hôtel n’incluaient pas, avec de grandes commodes, des meubles et des cheminées Renaissance comme au château de Blois … « »
Cet escalier, d’ailleurs, tout le bois, comme on le faisait alors dans quelques maisons, rapportent ce style à Henri II qui avait été pendant si longtemps l’idéal d’Odette et qu’elle allait bientôt désengager …
Edmond Lepelletier, dans Le Pressoir des Deux contees (1887-1888) fait une comparaison peu flatteuse:
« Avec son visage tordu, ses petits yeux gris très tranchants et la dandine grotesque qui résultait de ses jambes comme ces colonnes sculptées, ornement de buffets bourgeois, style Henri II, Basset avait l’air mauvais et continuellement semblait à la recherche d’un mauvais tour à jouer prochain.
René Crevel:
« Pour un petit bourgeois français, une mère est un meuble, tout comme le buffet Henri II, le Pleyel dans le salon, ou le faux lit double Louis XVI des parents. »  »
On le trouve dans l’inventaire de Jacques Prévert:
«Un buffet Henri II deux buffets Henri III trois buffets Henri IV»
Philippe Jullian, dans son livre Les Styles (1961) consacre une entrée aux salles à manger Henri II.